Résumé Exécutif

Depuis environ 4 ans, Haïti fait face à une crise socio-politique et à des mauvaises performances agricoles qui ont des répercussions significatives sur la sécurité alimentaire des ménages haïtiens, surtout des plus vulnérables. Dans un contexte de détérioration des facteurs comme l’inflation, les déficits pluviométriques, la violence généralisée des gangs et l’impact des différents chocs antérieurs qui sont susceptibles d’influencer les conditions de sécurité alimentaire en Haïti, il était devenu indispensable d’organiser une nouvelle enquête nationale de suivi de la sécurité alimentaire. Elle fait suite à la précédente enquête nationale (ENSSAN 2021), dont les données
avaient été collectées en août 2021. Cette nouvelle enquête nationale avait pour objectif de mettre à jour les données sur la sécurité alimentaire et la nutrition mais aussi d’évaluer les marchés et la performance de la campagne agricole de printemps 2022. Cette enquête était constituée de deux volets : un volet ménage et un volet communautaire dont les résultats ont été publié en novembre 2022.

Les résultats de ce document sont issus du volet ménage dont les données ont été collectées en août 2022 auprès d’un échantillon représentatif de la population haïtienne constituée de 6,720 ménages dont 4,830 ménages dans les zones rurales et 1,890 dans l’aire métropolitaine de Portau-Prince et dans les villes des Cayes et Jérémie. Ces zones rurales sont constituées de 23 zones d’analyse, basées sur les zones de moyens d’existence de 2015, à l’intérieur de chaquedépartement. Quant à la zone urbaine, elle a couvert les 7 communes de l’aire urbaine de Port-auPrince Prince, à savoir : Port au Prince, Carrefour, Pétion-Ville, Delmas, Cité-Soleil, Tabarre et Croix-des-Bouquets ainsi que les villes des Cayes et de Jérémie. Le découpage en zones d’analyse de ces communes urbaines s’est basé sur une analyse précédente des différents types d’habitats et de richesse relative qui composent les communes, répartie dans trois catégories : quartiers très
pauvres, quartiers pauvres, ou quartiers moyens et mieux lotis.

L’analyse des données attestent les faits suivants :

1. 46% des ménages sont dirigés par des femmes, alors que 54% sont sous l’autorité des

hommes, et ce, indépendamment de la strate considérée. Le niveau de scolarisation des

femmes chefs de ménages est plus faible que celui des hommes.

2. Selon l’analyse des données de l’ENSSAN 2022, à l’échelle du pays l’âge moyen des chefs

de ménage est de 48 ans. À l’exception des départements de l’Artibonite, du Nord-Ouest

et de l’Ouest dont les chefs de ménage sont en dessous de l’âge moyen nationale.

3. Dans l’ensemble, la source principale d’aliments des ménages, indépendamment du milieu
de résidence et des zones considérées, est le marché

4. La prévalence de la consommation alimentaire inadéquate à l’échelle nationale est de 51%.
Cette prévalence, elle est plus élevée dans les zones rurales (52.6%) que dans les zones
urbaines (48.4%). En zones rurales, quatre strates affichent des scores de consommation
alimentaire pauvre particulièrement élevés : Ouest HT07 (77%), Nord HT02 (73%),
Artibonite HT01 (72.1%) et Artibonite HT04 (71.2%). En zones urbaines ce sont les
communes de Carrefour (65%) et de Port-au-Prince (60%) qui affichent les plus forts
pourcentages de ménages avec une consommation alimentaire pauvre.

5. Si pour le score de consommation alimentaire la situation semble être préoccupante, le
score de diversité alimentaire des ménages indique une amélioration puisque seulement
3% des ménages à l’échelle nationale a une faible diversité alimentaire. La faible diversité
alimentaire est surtout observée dans les communes de la Croix-des-Bouquets (12%), de
la Grand ‘Anse (12%) et la zone OuestHT05 (7%).

6. A l’échelle nationale, 31% des ménages ont recours à des stratégies de crise et 33 % à des
stratégies d’urgence. Le recourt aux stratégies de crise et d’urgence est très fréquent à
travers presque toutes les zones de moyens d’existence. La ville des Cayes, de Carrefour
et la zone Nord HT02 sont les seules pour lesquelles les pourcentages de ménages ayant
utilisé les stratégies les plus sévères sont inférieurs à 40%. Environ 80% des ménages des
zones du Haut Plateau, des Nippes HT01, du Sud HT08, de l’Artibonite HT03 et de la
Grand’Anse HT07 ont adopté des stratégies de crise et d’urgence.

7. Le sexe du chef de ménage semble peu influencer sur le niveau d’insécurité alimentaire du
ménage. En revanche, on note des niveaux d’insécurité alimentaire plus marqués au sein
des ménages monoparentaux, ceux dont le chef de ménage se trouve en situation de
handicap et ceux dont le chef de ménage présente un faible niveau d’éducation

8. Les données révèlent aussi que cette année, la proportion de ménage qui a expérimenté la
faim en raison de manque de ressource pour s’acquérir des aliments a plus que doublée,
71% des ménages ont vécu la faim en 2022 contre seulement 32.9 % en 2021. Un peu plus
de 7 ménages sur 10 ont utilisé des stratégies de crise et/ou d’urgence.

9. En ce qui concerne les sources de revenus, les trois principales sources de revenus des
ménages sont la production agricole (61%), le commerce (61%) et le travail indépendant
(21%).

10. L’évaluation des besoins essentiels des ménages, montre qu’à l’échelle du pays près de
37% des ménages ont des dépenses mensuelles inférieures au seuil du panier minimum de
dépenses (MEB).

11. En termes de dépenses alimentaire, globalement en Haïti, les ménages y consacrent une
part importante ; elle représente en moyenne 70% de leur budget total et témoigne de leur
forte vulnérabilité économique. Le montant moyen des dépenses alimentaires mensuelles
à l’échelle nationale est de 16,943 gourdes et il est plus élevé chez les ménages dirigés par
des hommes soit 17,508 HTG contre 16,273 HTG pour les femmes.

12. Environ 40% des ménages urbains et ruraux affirment avoir eu des difficultés d’accès au
marché pour s’approvisionner en biens alimentaires de base et 20% des ménages ruraux ont
déclaré avoir eu des difficultés d’accès au marché pour s’approvisionner en intrants
(semences, engrais etc.).

13. L’accès à la nourriture (87 %) demeure toujours le premier besoin prioritaire identifié par
les ménages, en deuxième position vient l’accès aux intrants agricoles (35%) suivi de
l’appui à l’élevage (29%). Enfin, concernant l’assistance alimentaire, si les ménages
enquêtés étaient ciblés par la suite, ils préfèreraient majoritairement recevoir une assistance
mixte, composée d’une distribution monétaire en cash (79.7%), d’une distribution
alimentaire représentant (12.7%) et 7.6% préfèreraient recevoir des bons d’achats tant en
milieu urbain qu’en milieu rural.

  1. Environ 16 % des ménages vivant dans des quartiers pauvres et très pauvres des zones
    urbaines du pays n’ont pas accès à des sources d’eau protégées. Parmi les zones les plus
    affectées par ce problème, la commune de Cité Soleil où des cas de décès sont enregistrés
    suite à la recrudescence du choléra en Haïti depuis quelques mois, a le taux le plus élevé
    des ménages n’ayant pas accès á des sources d’eau protégées, soit 55.5%, suivi de Delmas
    (32%), puis Carrefour (23%). 20% de la population des zones rurales n’a pas accès à une
    source d’eau protégée.
  1. Dans l’ensemble, la réduction des performances de la production agricole, la persistance
    de l’insécurité et conflits entre les gangs armés et la maladie d’un ou plusieurs membres
    du ménage sont les principaux chocs qui les ont affectés.
  1. Pour les facteurs de blocage de l’agriculture, environ 65 % des ménages ont déclaré n’avoir
    pas eu d’argent, 37 % ont évoqué le prix trop élevé des intrants, 24 % ont fait mention du
    problème de la main d’œuvre et 23 % ont fait ressortir l’indisponibilité de semences ainsi
    que le manque d’appui.

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